L’Institut d’émission des Dom (IEDOM) de Martinique a publié sa note de conjoncture du 3ème trimestre de cette année 2025 (n° 857 de décembre 2025). Il annonce prudemment : “La reprise dans l’expectative”.
La situation est résumée comme suit : “L’embellie perçue au deuxième trimestre et globalement depuis le début d’année, matérialisée par une progression de l’ICA (ndlr : Indicateur du Climat des Affaires), ne s’est pas confirmée au troisième trimestre. Ainsi, l’ICA affiche un léger fléchissement pour s’établir à 102,8 points, mais reste au-dessus de sa moyenne de longue période.
Le troisième trimestre affiche des performances moins favorables qu’attendu, avec notamment un niveau d’activité qui se détériore à nouveau. La consommation des ménages semble se maintenir, soutenue par une hausse des prix limitée. Un point de vigilance concerne l’évolution défavorable de certains indicateurs de vulnérabilité des ménages.
Le marché de l’emploi reste atone, mais les chefs d’entreprise laissent entrevoir une amélioration possible pour la fin d’année”.
Voyons ce qui justifierait cette appréciation.
Après trois hausses successives, l’ICA affiche un léger repli au troisième trimestre 2025. Il s’établit à 102,8 points, soit une baisse de 1,2 point sur le trimestre. Il est souligné que les débats parlementaires sur une réforme des dispositifs fiscaux de soutien aux entreprises ultramarines ont pu accentuer les incertitudes des acteurs économiques ce trimestre.
L’activité marque le pas
L’activité, dont la baisse semblait endiguée au deuxième trimestre, fléchit au troisième trimestre selon les résultats de l’enquête de conjoncture. L’évolution du volume d’heures rémunérées, indicateur concret de l’activité des entreprises, vient confirmer cette tendance. Celui-ci recule de 1,0 % en juillet et de 2,7 % en août 2025 par rapport aux mêmes mois de l’année précédente (Insee).
L’inflation se maintient à un niveau modéré
En glissement annuel, l’inflation est restée stable entre juin et septembre 2025 à 0,9 %. Il s’agit du 8e mois consécutif avec un niveau d’inflation inférieur à 2 %. Le niveau est légèrement inférieur à celui de la France (+1,2 %).
Le marché de l’emploi toujours atone
Les effectifs de l’emploi salarié affichent une baisse de 0,1 % au deuxième trimestre 2025 par rapport au trimestre précédent (stables pour le secteur privé et – 0,2 % pour le secteur public) et de 0,8 % par rapport au deuxième trimestre 2024.
S’agissant du marché du travail, les chiffres sur les demandeurs d’emploi hors RSA et jeunes en parcours révèlent une baisse des demandeurs d’emploi de catégorie A de 0,8 % (CVS-Corrigé des variations saisonnières) par rapport au deuxième trimestre 2025, mais de +3,4 % CVS en évolution annuelle.
À noter que le nombre d’intérimaires est en baisse en juillet et en août (respectivement -9,0 % et -10,3 %) par rapport aux mois identiques de l’année précédente, reflet d’une activité économique atone.
La consommation des ménages en voie de stabilisation
Dans ce contexte d’inflation limitée, la progression des recettes de TVA ce trimestre (+1,1 % CVS) est accompagnée par une hausse des importations de biens de consommation non durables (+0,7 % CVS). Les importations de biens de consommation durables sont en baisse (-0,7 % CVS) et les ventes de véhicules aux particuliers restent stables sur le trimestre.
Toutefois le nombre de dossiers déposés à la commission de surendettement enregistre une hausse significative, sur les trois premiers trimestres de l’année (+29,3 %). Les incidents de paiements sur les crédits accordés aux particuliers sont quant à eux légèrement plus nombreux (+1,1 % sur le trimestre et +3,6 % sur l’année). Signes de perte de pouvoir d’achat ?
L’investissement en demi-teinte
Ainsi, l’investissement affiche une baisse marquée au troisième trimestre (-19,6 % CVS), mais est en hausse par rapport au troisième trimestre de l’année passée (+7,5 % CVS).
Bien qu’en baisse par rapport au trimestre précédent, le nombre d’entreprises en défaillance augmente de 4,5 % en cumul sur l’année par rapport au troisième trimestre 2024 et s’établit à 463. Cette hausse s’explique principalement par les défaillances d’entreprises du secteur du tourisme, qui ont presque doublé sur la période.
Les échanges extérieurs se stabilisent
Globalement, les exportations et les importations restent stables sur les trois premiers trimestres 2025 par rapport à la même période en 2024 (+0,2 % CVS), mais demeurent en retrait par rapport à 2023 (- 24,3 % CVS pour les exportations et -6,3 % CVS pour les importations).
En parallèle, les exportations de produits pétroliers, en baisse le trimestre dernier (-58,0 % CVS), sont en forte hausse (+249,1 % CVS) sur ce troisième trimestre. Les importations de produits pétroliers enregistrent également une hausse (+11,7 % CVS).
Situation sectorielle
Les chiffres relatifs à la production agricole et agroalimentaire sont plutôt bien orientés au troisième trimestre. Les exportations de bananes et de rhum sont en hausse respectivement de 6,4 % et 12,7 % (CVS) et le volume total d’abattage augmente également (+3,1 % CVS). Ces chiffres s’inscrivent cependant dans un contexte où la production locale baisse de façon tendancielle et où la dépendance aux importations reste marquée, notamment avec les importations de produits agricoles et agroalimentaires qui progressent (+9,8 % CVS ce trimestre par rapport au troisième trimestre 2024).
Parmi les faits récents figurent les difficultés rencontrées par les petits planteurs de canne pour pérenniser leur activité, les conditions météorologiques défavorables qui pénalisent l’ensemble des productions, ainsi que les problèmes d’approvisionnement en eau, notamment dans le nord.
Concernant le tourisme, après des résultats satisfaisants sur le premier semestre avec un trafic aérien dynamique, le nombre de nuitées et de passagers recensés à l’aéroport sont assez stables ce trimestre (+0,7 % CVS). On observe toutefois moins de vols par rapport au trimestre précédent (-4,5 % CVS), traduisant une basse saison particulièrement morose.
Pour ce qui est du BTP, le solde d’opinion sur l’activité repasse timidement en territoire positif ce trimestre. Ce léger rebond, malgré les difficultés structurelles du secteur, se confirme à travers les données d’importations des différents matériaux utilisés dans le secteur (+14,0 % CVS d’importations d’éléments en métal pour la construction, +13,6 % CVS d’importations de carrelage, +3,0 % de consommation de ciment) et de constructions de logements neufs (+20,4 % CVS) sur le trimestre.
En définitive, il est mentionné par l’Iedom que des incertitudes supplémentaires ont pesé sur les chefs d’entreprise ce trimestre, notamment concernant la réforme des exonérations de charges sociales (LODEOM) et les restrictions envisagées pour la défiscalisation sur l’investissement productif. Les acteurs économiques demeurent dans l’attente, à l’approche du vote définitif du projet de loi de finances 2026.
Antoine Gilles avec Iedom

