Législatives 2024 : le Nouveau Front Populaire crèe la surprise et remporte une victoire historique, mais aucun des blocs ne dispose de la majorité

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Dimanche dernier, les Français étaient appelés à choisir leurs députés à l’occasion du second tour des élections législatives anticipées. Alors que depuis quelque temps, ils se détournaient des urnes, ils s’étaient massivement mobilisés avec un taux de participations de 67%, le plus élevé depuis fort longtemps. 

Un enjeu historique 

Dans un contexte marqué par une très forte poussée de l’extrême droite qui avait déjà obtenu un score particulièrement élevé lors des européennes, la décision subite d’Emmanuel Macron de dissoudre l’Assemblée nationale avait placé le Rassemblement national dans la situation idéale pour remporter ce scrutin. Du reste, tous les sondages le donnaient vainqueur, avec même la possibilité d’atteindre la majorité absolue et donc de diriger le pays. Le secrétaire national de la formation lepéniste se voyait déjà au poste de Premier ministre, tandis que Marine Le Pen fourbissait ses armes en vue de la présidentielle de 2027. Fort heureusement, la gauche s’est rassemblée pour écarter ce danger. Mettant leurs divergences de côté, ses différentes composantes, à savoir socialistes, communistes, écologistes, insoumis se sont rassemblées au sein du Nouveau Front populaire (NFP) pour faire barrage à cette vague brune. Elles ont vite été rejointes par les syndicats, les associations et certaines ONG. C’est sous cette bannière que les forces populaires ont abordé ce scrutin historique dont dépendait le sort de la démocratie française, mais qui s’avérait être le plus indécis de l’histoire de la Ve République. Dès lors les objectifs du Rassemblement national se trouvaient contrariés. Dans l’incapacité de proposer aux électeurs un programme cohérent susceptible de répondre à leurs attentes et avec certains candidats d’une rare médiocrité, il se déchaînait contre le Nouveau Front populaire. Mais la digue a tenu à l’image des très nombreuses manifestations de protestation contre le danger frontiste à travers toute la France durant l’entre-deux tours. 

Une victoire historique de la gauche mais sans majorité 

Au terme d’une campagne électorale d’une grande intensité et marquée par la multiplication d’actes racistes et xénophobes, les urnes rendaient leur verdict. Dès 20 H, les premières estimations annonçaient la victoire du Nouveau front populaire et la relégation à la 3e place du parti de Bardella, Avec 188 à 199 députés NFP élus (auxquels il faut ajouter 10 élus divers gauche), selon les estimations de l’Ifop à 21 h 20, la gauche s’impose à la fois comme principale force politique dans l’Hémicycle et comme principale alternative à l’extrême droite et à la Macronie. Les troupes présidentielles, avec 164 à 169 députés avaient évité la déroute, bien qu’ayant très sérieusement reculé. L’extrême droite, avec 135 à 143 élus voyait s’envoler ses rêves de gouverner le pays. 

Une situation politique des plus compliquées 

En dépit de la victoire du nouveau Front populaire, la question de l’exercice du pouvoir, faute de majorité absolue, reste cependant entière. Les 577 députés que compte l’Assemblée nationale étant répartis entre trois blocs de poids sensiblement équivalent, tandis que la soixantaine d’élus LR seraient bien tentés de jouer les trouble-fête en faisant basculer la balance d’un côté comme de l’autre. 

Emmanuel Macron, à force de jouer à la roulette russe et de tenter des coups de poker dangereux et invraisemblables, a fini par se prendre les pieds dans l’épais tapis de l’Élysée. Le premier ministre Gabriel Attal a annoncé qu’il remettrait sa démission dès le lendemain des élections. Le rôle des députés macronistes sera néanmoins déterminant : laisseront-ils le NFP gouverner, en assumant et reconnaissant leur défaite, ou pèseront-ils de toutes leurs forces pour mener le pays vers l’instabilité, au risque de voir le RN prospérer et récolter les fruits en 2027 ? 

Plusieurs questions restent en suspens à commencer par celle du Premier ministre. Dès l’annonce des premiers résultats qui plaçaient le Nouveau Front populaire en tête, Jean-Luc Mélenchon a appelé Macron à “respecter la volonté du peuple”. “Le président de la République a le pouvoir et le devoir d’appeler le Nouveau Front Populaire à gouverner. Le Premier ministre doit s’en aller, il a reçu un vote de défiance populaire et massif”. Et d’ajouter : “Le président doit s’incliner et admettre cette défaite sans tenter de la contourner”. Mais avec qui pourrait-il gouverner lorsqu’il annonce refuser d’avance toute négociation avec l’ex-majorité présidentielle et promis que la coalition de gauche “appliquera son programme, rien que son programme, mais tout son programme”. Les tensions risquent de surgir au sein du bloc de gauche. Certains de ses responsables ayant déjà annoncé qu’ils s’opposeraient à la nomination de Mélenchon au poste de Premier ministre. Le Front de gauche pourra-t-il mettre en oeuvre les mesures d’urgence annoncées comme l’abolition de la réforme des retraites ou l’augmentation du Smic ? 

Une coalition des députés hostiles à l’extrême droite peut-elle se bâtir ? Les députés LR (63 élus) vont-ils venir prêter main-forte au RN, afin de réclamer la mise en place d’un gouvernement d’union des droites, ou s’allieront-ils aux macronistes ? Que va faire Emmanuel Macron, passé expert dans l’exhumation d’articles de la Constitution lui permettant de tordre les bras à la démocratie française ? Autant de questions qui restent sans réponse au lendemain de ce scrutin, qui a placé la France dans une situation inédite. 

Après ce scrutin sans véritable vainqueur, ce pays risque de se trouver dans une situation de blocage institutionnel pendant au moins un an, période durant laquelle l’Assemblée ne peut pas être à nouveau dissoute. 

Quelques réactions 

Fabien Roussel, secrétaire national du PCF : “Ce 7 juillet rentrera dans l’histoire. Les Français ont déjoué le scénario annoncé. Je suis fier de notre peuple. Répondons à ses aspirations. Il y a urgence” 

Olivier Faure, Premier secrétaire du PS après avoir salué “la victoire du Nouveau Front populaire a déclaré que “ce vote confère au NFP une responsabilité immense de trouver un chemin pour faire avancer la France. Nous ne nous prêterons à aucune coalition des contraires qui trahirait le vote des Français””

François Bayrou qui se voit déjà à Matignon rappelle que “C’est le président qui nomme le Premier ministre”. Il estime “qu’il est inimaginable que le Nouveau front populaire ait quelque majorité que ce soit”

Pour le Premier ministre Gabriel Attal : “Une nouvelle ère commence. Le centre de gravité du pouvoir sera plus que jamais au Parlement”

Preuve de la complexité de la situation, Emmanuel Macron a déclaré attendre la “structuration” de la nouvelle Assemblée pour “prendre les décisions nécessaires”

GE

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