Il y a un cruel paradoxe que met en lumière la disparition du leader dʼextrême droite néo-fasciste Jean-Marie Le Pen. Dʼune part, par deux fois, les Martiniquais, le 26 décembre 1987 et le 6 décembre 1997, ont empêché le Président du Front national de débarquer en Martinique et lʼont contraint à rebrousser chemin. Dʼautre part, récemment, le Rassemblement national, ex-Front national, a réalisé des scores considérables aux élections européennes et même législatives tant en Martinique que dans les autres pays dits dʼoutre-mer. Les idées simplistes du populisme pour sʼattaquer au mal-vivre et ses appels contre lʼimmigration rendue responsable de tous nos maux ont trompé notre peuple. Il ne faut pas se voiler la face.
La mort de Jean-Marie Le Pen, lʼhomme par qui lʼextrême droite a été réhabilitée, jette une lumière crue sur la lepénisation des esprits en France et chez nous. À lʼannonce du décès du tortionnaire colonialiste, raciste, antisémite, anticommuniste viscéral, les chaînes dʼinfo en continu, comme CNews de Bolloré, ont consacré des heures dʼantennes à lʼhomme qui qualifia les chambres à gaz de Hitler de “détail de l’histoire”.
Une grande partie de la droite française nʼa pas hésité à qualifier de “visionnaire”, de “lanceur d’alerte” Jean-Marie Le Pen qui affirmait : “Je crois à l’inégalité des races, c’est évident”, qui a lancé “Durafour crématoire”, taxé lʼOccupation allemande de la France “pas particulièrement inhumaine”, entretenu la haine des patriotes indochinois, algériens, palestiniens, etc.
Il faut rappeler à ce beau monde que le racisme, le négationnisme, lʼantisémitisme ne sont pas des “dérapages” mais des délits punis par la loi. Une loi qui fut portée par le communiste Jean-Claude Gayssot les sanctionne durement. Cette loi tend à réprimer tout acte raciste, antisémite ou xénophobe. Elle est la première des lois mémorielles françaises.
Principale innovation juridique, elle réprime la contestation de l’existence des crimes contre l’humanité qui furent définis dans le statut du Tribunal militaire international de Nuremberg.
Cette vaste opération de blanchiment de Jean-Marie Le Pen aura au moins raclé le vernis de “respectabilité” entretenu par sa progéniture Marine Le Pen, Marion Maréchal Le Pen, etc. Chez les cadres du RN, la mise au ban de la brebis galeuse pour cause de “dédiabolisation” a laissé place aux hommages émus, aux promesses de fidélité à ses idées (Jordan Bardella). Le soi-disant “changement” du RN est mis à nu.
Précisément, la mort de Jean-Marie Le Pen doit être lʼoccasion de clarifications sur le parti néo-fasciste Rassemblement national.
Il reprend lʼhéritage colonialiste et raciste de lʼancêtre qui lʼa porté sur les fonts baptismaux. Ce parti ne veut pas entendre la revendication de décolonisation des Kanaks et soutient à fond les caldoches. Il reprend à son compte pour les DOM la vieille calomnie que lʼoctroi de mer est le principal responsable de la vie chère pour ne pas sʼen prendre aux capitalistes qui se sucrent abondamment sur toute la chaine de constitution des prix outre-mer. Et il veut sa suppression qui ne peut que favoriser et accentuer la pénétration de la production française et européenne dans nos marchés dans la pure tradition du pacte colonial.
Malgré les éloges indécents dʼun Juvénal Rémir au disparu, le fond raciste fondamental de ses émules nʼa pas disparu et ne sʼest pas évaporé. La vigilance est de mise à lʼheure où la France sʼenfonce dans une crise politique sans précédent et où lʼextrême droite néofasciste progresse en engrangeant les dividendes du mécontentement populaire contre la politique macroniste au service du capital financier.
Le Pen est mort, mais ses idées prospèrent. Nous ne dansons pas sur son cadavre. Mais nous appelons à continuer à combattre son idéologie nauséabonde.
Michel Branchi (13/01/2025)
NDLR : Le Pen mort, il faut combattre ses idées dangereuses NDLR : Nous publions la semaine prochaine des extraits dʼun article de “Libération” sur le groupe GBH et la réaction de ce dernier.