
Les députés ont à leur écrasante majorité votée contre le volet recettes du projet de loi de finances, dans la nuit de vendredi 21 novembre à samedi 22 novembre. La possibilité d’adopter un budget avant le 31 décembre est désormais quasi nulle. On vous explique les scénarios possibles.
On le savait : il n’y a aucune majorité à l’Assemblée nationale pour voter le budget de l’État. Confirmation dans la nuit de vendredi à samedi avec le rejet quasi unanime de la partie recettes du projet de loi de finances (PLF) par les députés.
Amendé de toutes parts, à droite comme à gauche, le texte avait fini par ressembler à un “budget Frankenstein”, selon les mots du président de la commission des Finances, Éric Coquerel (LFI), ne satisfaisant aucun groupe, pas même ceux du camp macroniste, lequel s’est divisé entre abstentions et votes contre le PLF. Le Parti socialiste, qui s’enorgueillit d’avoir arraché quelques avancées comme la création d’un impôt sur la fortune improductive, a lui aussi estimé que “le compte n’y est pas”. Le texte a été rejeté au final par 404 voix contre et une voix pour (celle d’Harold Huwart, député centriste du groupe Liot). Jamais dans l’histoire de la Ve République un budget n’a été rejeté avec une telle ampleur.
Le Sénat a désormais la main
De facto la partie dépenses du budget tombe aussi car le pouvoir législatif ne peut pas en discuter tant que les recettes n’ont pas été votées. La balle part donc au Sénat, qui doit travailler à partir de la copie initiale prévue par le gouvernement et peut ignorer celle rejetée à l’Assemblée nationale. La Haute assemblée dispose, elle, d’une majorité à droite, et devrait donc accoucher d’une copie plus cohérente, mais beaucoup plus austéritaire et moins redistributive (c’est dire…) que celle de l’exécutif.
Les sénateurs ont fait savoir qu’ils ne termineraient l’examen que le 15 décembre. Ce qui laisserait très peu de temps pour mettre en place une commission mixte paritaire (sans garantie d’avoir un accord entre députés et sénateurs) et ensuite voter le texte qui en sortirait.
Des lois spéciales avant Noël ?
La probabilité d’un budget voté avant le 31 décembre est donc très faible. Le gouvernement aura alors deux options : déposer une loi spéciale (avant vendredi 19 décembre) pour prolonger le budget actuel de l’État sur les premiers mois de l’année 2026 afin de laisser le temps aux parlementaires d’aller au bout de l’examen, ou adopter le budget par ordonnances. Le premier ministre Sébastien Lecornu s’est plusieurs fois prononcé contre cette seconde option, synonyme de censure quasi automatique pour son gouvernement (car ce serait perçu comme un 49.3 déguisé, alors que le premier ministre y a officiellement renoncé).
Cyprien Caddeo (L’Humanité du 22 novembre 2025)
