Gérald Darmanin annonce « la fin du droit du sol » et « des visas territorialisés » à Mayotte

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En déplacement à Mayotte le dimanche 11 février, Gérald Darmanin a annoncé une révision constitutionnelle pour supprimer le “ »droit du sol” et la fin “des visas territorialisés” sur l’île, confrontée à une grave crise migratoire. Si la gauche s’indigne, la droite et l’extrême-droite applaudissent.

Gérald Darmanin, en déplacement à Mayotte, a annoncé dimanche 11 février une révision constitutionnelle pour supprimer le droit du sol sur l’île de l’océan Indien, confrontée à une grave crise migratoire. L’île était paralysée depuis trois semaines par des barrages routiers installés par des “collectifs citoyens” pour protester contre l’insécurité et l’immigration incontrôlée.

“Le président de la République m’a chargé de dire aux Mahorais que nous allons prendre une décision radicale qui est la fin de l’inscription du droit du sol à Mayotte dans une révision constitutionnelle”. “Il ne sera plus possible de devenir Français si on n’est pas soi-même enfant de parent français”, a-t-il ajouté. “Nous couperons ainsi l’attractivité qu’il peut y avoir dans l’archipel mahorais. Il ne sera donc plus possible de pouvoir venir à Mayotte de façon régulière ou irrégulière et d’espérer de devenir Français de cette façon”. “C’est une mesure extrêmement forte, nette, radicale, qui évidemment sera circonscrite à l’archipel de Mayotte”, a-t-il ajouté.

Mayotte, un pays dits dʼoutre-mer entièrement à part

Mettre fin aux visas territorialisés

« Nous allons mettre fin aux visas territorialisés » à Mayotte, annonce également Gérald Darmanin. « Nous allons nous donner jusqu’à la prochaine loi Mayotte », a précisé le ministre.
« Nous aurons beaucoup moins de titres de séjour, et nous n’aurons plus la possibilité d’être Français lorsqu’on vient à Mayotte de façon régulière ou irrégulière. Ces visas territorialisés n’ont plus lieu d’être et Mayotte qui est un territoire commun à l’ensemble de la République n’a plus à connaître cette situation », a affirmé Gérald Darmanin.

Un « projet de loi d’urgence » présenté « avant l’été »

Enfin, le gouvernement « souhaite » présenter son « projet de loi d’urgence » pour Mayotte « avant l’été en Conseil des ministres », a précisé ce dimanche 11 février Marie Guévenoux, la nouvelle ministre déléguée aux Outre-mer. Ce projet de loi avait été annoncé par le Premier ministre Gabriel Attal lors de sa déclaration de politique générale à l’Assemblée nationale, le 30 janvier dernier, pour faire face aux enjeux exceptionnels auxquels le département français est confronté. « Je prends l’engagement qu’un projet de loi d’urgence pour Mayotte qui sera basé sur le travail qui a été fait par les élus et qui n’occultera aucun sujet : des questions d’immigration, des questions de convergences sociales et des questions d’économie sociale, d’infrastructures aussi essentielles pour l’île. Aucun de ces points ne sera occulté », a-t-elle promis. « Nous travaillerons en concertation avec les élus, les acteurs économiques et de manière générale, la population », a ajouté la ministre déléguée aux Outre-mer. Marie Guévenoux a également annoncé qu’elle reviendra « dans un mois à Mayotte » pour s' »assurer que l’ensemble des dispositions annoncées par le ministre de l’Intérieur et que le travail qui se fait autour de ce projet de loi d’urgence soit dans le bon ordre ».

La gauche indignée

La gauche s’est indignée immédiatement de l’annonce, par Gérald Darmanin, d’une révision constitutionnelle pour supprimer le droit du sol à Mayotte. Le PS s’opposera à cette révision de la constitution, a annoncé le patron des députés Boris Vallaud sur France 3. « Est-ce que la révision constitutionnelle du droit du sol va changer quoi que ce soit à la situation à Mayotte ? », a-t-il demandé. « Je ne le crois pas, voilà pourquoi je ne suis pas favorable à la révision du droit du sol à Mayotte, qui est déjà sous l’empire d’un régime juridique qui est beaucoup plus sévère pour obtenir la nationalité française que tout le reste de la France », a-t-il souligné. « Le droit du sol n’est pas négociable. Il est déjà adapté à Mayotte, et il n’a pas fait la démonstration que cela ait changé quoi que ce soit », a-t-il insisté. Pour la tête de liste écologiste aux européennes Marie Toussaint, « mettre fin au droit du sol à Mayotte ne résoudra pas les difficultés du territoire, mais cela vient abîmer notre République ». « La démolition de nos valeurs par un président de la République qui devance l’extrême droite est un recul terrible », a-t-elle estimé sur X. Le député écologiste Aurélien Taché a, lui aussi, dénoncé la mesure sur BFMTV : « Quand on rompt comme ça avec le droit du sol, qui est attaché à l’histoire républicaine française depuis plus de deux siècles, c’est qu’on considère que la nationalité n’est plus attachée à l’endroit où vous naissez mais à l’origine ou la nationalité de vos parents. C’est extrêmement grave ». Selon lui, « si cette disposition va jusqu’au bout et si Marine Le Pen arrive au pouvoir ensuite, c’est la fin du droit du sol en France ». « C’est évidemment extrêmement dangereux », a alerté ce dimanche sur franceinfo Patrick Baudouin, président de la Ligue des droits de l’Homme (LDH). « Il faut rappeler que c’est vraiment une remise en cause d’un droit fondamental qui existe en France depuis 1804 et Napoléon. On avait instauré ce droit du sol à cette époque qui avait ensuite été renforcé en 1851, a-t-il insisté. C’est vraiment un élément fondamental de distinction par rapport au droit du sang ». Pour Patrick Baudouin, cette mesure va mettre en place une inégalité entre les territoires français : « En 1974, l’île a fait le choix de rester au sein de la République française en tant que département et là on est en train d’instaurer – si cette mesure était mise en œuvre – une discrimination ». Il estime également que relancer ce débat « renforce le RN ».

Mesure applaudie par la droite et l’extrême droite

Cette mesure a été aussitôt applaudie par la droite et l’extrême droite. « C’est beaucoup de temps perdu pour en arriver à cette conclusion que supprimer le droit du sol, non seulement à Mayotte, mais partout en France, est non seulement nécessaire, mais possible », a souligné sur Europe 1 le député du RN Sébastien Chenu, rappelant que Marine Le Pen avait déposé une proposition de loi en ce sens « dès 2018 ». Selon lui, pour éviter « les foudres du Conseil constitutionnel », il faut « que la fin du droit du sol s’applique à toute la France, à travers un référendum et une révision de la constitution ». La candidate du parti Reconquête ! aux européennes, Marion Maréchal a aussi salué sur BFMTV l’annonce, réclamant l’extension de la mesure « à l’ensemble du territoire français », car « ce que vit Mayotte aujourd’hui, c’est ce que vivra la métropole dans 30, 40, 50 ans si nous ne faisons rien », a-t-elle affirmé. Le patron des Républicains Éric Ciotti a réagi de manière identique : « Ce qui se passe à Mayotte risque de toucher demain la France métropolitaine. Partout sur le territoire national, nous devons supprimer le droit du sol ! », a-t-il écrit sur X.

Source : Isabelle Lassalle -France Bleu (Dimanche 11 février 2024)

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