Attendu depuis 15 ans, le premier procès de l’affaire Green Parrot s’est tenu du 28 au 30 avril, en l’absence d’Alfred Marie-Jeanne, dont l’audience a été reportée au 17 septembre 2025 en raison de son état de santé. Ce sont finalement sa fille, Maguy Marie-Jeanne, et l’architecte Mark Frampton qui ont été jugés. Le verdict du couple sera rendu le 25 juin 2025.
Dans la salle d’audience du tribunal parisien, un silence presque glacial régnait. Une petite poignée de personnes était venue y assister. A la barre, deux accusés visiblement remplis d’émotion, mais surtout très fatigués, après trois jours de témoignage. Cela faisait plus de 15 ans que le couple de Maguy Marie-Jeanne et Mark Frampton, les deux personnages secondaires du dossier “Green Parrot” attendaient ce moment. Au total, ce procès aura duré trois jours. Il se sera déroulé sans la présence d’Alfred Marie-Jeanne, le principal protagoniste, son procès étant renvoyé au 17 septembre 2025, en raison de son état de santé.
Pour rappel, ces trois personnes sont accusées de prise illégale d’intérêts et de favoritisme dans l’attribution d’un marché public pour la reconstruction d’une école à la Dominique, financée par la collectivité régionale de Martinique. L’affaire avait commencé en 2009, lorsque d’un certain “Green Parrot” (“Perroquet Vert” en anglais) dénonçait dans Le Canard Enchaîné des irrégularités de la part de la présidence du Conseil Régional de Martinique. Dans le cas du couple, on reproche aux deux accusés d’avoir mêlé intérêt privé et responsabilité publique, par le biais d’une entreprise liée à Mark Frampton.
Une lutte pour la vérité
Au fil de l’audience, ils n’ont cessé de plaider leur bonne foi. La fille de l’ancien président du Conseil Régional de Martinique et l’architecte se sont efforcés de démontrer qu’il n’y avait, selon eux, ni manoeuvre illégale ni volonté de tirer un quelconque avantage de cette affaire. Le but était, selon eux, de simplement venir en aide à une île voisine. “Ce n’est pas la première fois que la collectivité passe des délibérations pour aider des territoires, c’est déjà arrivé pour la Dominique, Haïti, Sainte-Lucie, et même le Salvador, qui avaient été touchés par des catastrophes “, a voulu rappeler Maguy Marie-Jeanne. “La collectivité voulait simplement réhabiliter une ville qui était en détresse”.
Pour défendre leurs clients, les avocats des prévenus n’ont pas mâché leurs mots. Le message envoyé par les trois professionnels de la Justice qui étaient présents aura été le suivant : “Dans un État de droit, il n’est pas normal que la justice accorde du crédit à des lettres anonymes. On ignore les intentions réelles de ceux qui les rédigent, et elles ne devraient pas avoir leur place dans une procédure judiciaire.”
Dans son réquisitoire, la procureure de la République a demandé la relaxe du couple pour les faits de “faux et usage de faux”, estimant que les éléments à charge étaient insuffisants. En revanche, elle a maintenu les poursuites pour “prise illégale d’intérêts”. C’est alors qu’elle émis sa demande de peine : un an d’emprisonnement avec sursis, un an d’interdiction d’exercer dans un service public — également avec sursis — et une amende de 5 000 euros à l’encontre de Maguy Marie-Jeanne. Elle a également requis une amende de 10 000 euros à l’encontre de Mark Frampton, estimant que son cabinet d’architectes, directement impliqué dans cette affaire, s’était indûment enrichi. De son côté, l’avocat de la CTM, se présentant comme un partie civile, n’a formulé aucune demande de dédommagement.
Vers la fin du procès, le couple a exprimé son souhait que la justice aille au-delà de leurs cas individuels pour s’interroger plus largement sur l’utilisation des fonds publics et, surtout, pour rétablir la vérité. Ils ont également exprimé le sentiment d’avoir perdu 15 années de leur vie sociale et professionnelle, englouties par les conséquences de cette affaire. De leur côté, les avocats ont eux aussi insisté sur l’importance du respect strict de la procédure, espérant que la décision finale en tiendra pleinement compte. Cette audience était l’occasion, selon eux, de mettre fin à “une page noire de l’histoire judiciaire en Martinique”.

Mais qui est “Green Parrot” ?
Concernant le Perroquet Vert à l’origine de cette affaire, il court toujours dans la nature. Mais l’identité de “Green Parrot” ne serait finalement pas aussi secrète qu’elle puisse le paraître. “En réalité ce n’est pas un mystère, dans la mesure où il y a eu une procédure pour diffamation”, explique Maître Laurie Chantalou-Nordé, l’avocate de Maguy Marie-Jeanne. Elle a ajouté : “Il y a eu des condamnations sous l’aspect civil de ceux qui étaient considérés comme diffuseurs. Vu que la Martinique est un petit territoire, à partir du moment qu’il y a l’identité des diffuseurs, il est alors facile de se faire un avis sur la question”.
Le verdict concernant Maguy Marie-Jeanne et Mark Frampton sera finalement rendu le 25 juin 2025, au tribunal de Paris.
Thibaut Charles